« L’Afrique est aujourd’hui au cœur d’une mutation économique et démographique majeure qui influence profondément les besoins en compétences. Avec plus de 1,4 milliard d’habitants en 2025, dont 60 % ont moins de 25 ans, le continent détient la population active la plus jeune au monde, ce qui représente à la fois une opportunité et un défi. Les entreprises implantées en Afrique, qu’elles soient locales ou multinationales, se retrouvent confrontées à la nécessité de recruter, former et fidéliser une main-d’œuvre adaptée aux transformations structurelles de l’économie.

Dans ce contexte, l’évolution des besoins en compétences est l’un des enjeux RH les plus stratégiques, car il conditionne la capacité des pays africains à transformer leur potentiel démographique en croissance économique durable.

Si certains secteurs traditionnels comme l’agriculture et les industries extractives continuent d’occuper une place importante, les nouveaux moteurs de l’économie africaine reposent de plus en plus sur des domaines où les compétences spécialisées font défaut : numérique, énergies renouvelables, logistique, finance, santé, construction, services modernes. 

Ces évolutions exigent non seulement de repenser les systèmes éducatifs, mais aussi d’adapter les politiques RH et les stratégies de recrutement, afin de répondre aux attentes des entreprises et de réduire l’écart entre offre et demande sur le marché du travail africain. »

 

-1-Les grandes tendances du marché des compétences en Afrique

Le marché africain du travail est marqué par une double dynamique : une croissance forte de la demande en emploi liée à l’explosion démographique et une mutation qualitative des besoins en compétences sous l’effet de la modernisation économique. 

Les pays d’Afrique subsaharienne devraient voir entrer plus de 30 millions de jeunes sur le marché du travail chaque année d’ici 2030, alors que les créations d’emplois formels restent insuffisantes. 

Ce déséquilibre accroît l’importance de la qualité des compétences disponibles, car les entreprises cherchent des profils de plus en plus techniques et spécialisés, alors que l’offre reste souvent généraliste et inadaptée.

Un rapport récent de la Banque africaine de développement souligne que 80 % des jeunes Africains actifs travaillent dans le secteur informel, ce qui limite leur accès à la formation continue et à l’évolution professionnelle. Pourtant, les besoins des entreprises évoluent rapidement vers des métiers qui exigent une combinaison de compétences techniques, numériques et managériales. Le décalage entre l’offre et la demande de compétences crée un défi majeur pour les DRH, qui doivent investir dans des stratégies innovantes de recrutement, de formation et de fidélisation.

 

-2-Tableaux statistiques sur les besoins en compétences

Répartition des besoins en compétences par secteur en Afrique (2025-2030)

 

Secteur économique Compétences clés recherchées Part estimée dans la demande globale (%)
Numérique & TIC Développeurs, data analysts, cybersécurité, IA 25 %
Énergies & Environnement Ingénieurs énergies renouvelables, techniciens de maintenance 15 %
Santé Médecins, infirmiers, biotechnologie, e-santé 12 %
Agriculture modernisée Agro-industrie, agritech, supply chain 18 %
Construction & BTP Ingénieurs civils, urbanistes, techniciens spécialisés 10 %
Finance & Services Experts en fintech, compliance, audit, assurances 8 %
Logistique & Transport Supply chain managers, conducteurs spécialisés, aéronautique 7 %
Autres secteurs Éducation, commerce, industrie légère 5 %

Évolution de la demande de compétences par régions africaines

Région Tendances clés en compétences Exemples de pays moteurs
Afrique de l’Ouest Agriculture durable, fintech, énergie solaire Côte d’Ivoire, Sénégal, Ghana
Afrique de l’Est TIC, tourisme, logistique portuaire Kenya, Éthiopie, Tanzanie
Afrique centrale Infrastructures, mines, énergie hydraulique Cameroun, RDC, Gabon
Afrique australe Finance, santé, énergies vertes Afrique du Sud, Namibie, Zambie
Afrique du Nord Industrie, digital, automobile Maroc, Égypte, Tunisie

 

-3-L’impact du numérique sur les besoins en compétences

L’un des changements les plus spectaculaires concerne la montée en puissance du numérique. Le secteur des technologies de l’information et de la communication (TIC) représente déjà 5 % du PIB africain et devrait doubler d’ici 2030. Les entreprises de la tech recrutent massivement des développeurs, des experts en cybersécurité, des data scientists et des spécialistes de l’intelligence artificielle. 

Cependant, la formation de ces profils hautement techniques reste limitée dans de nombreux pays, ce qui conduit à une forte compétition entre entreprises locales et internationales pour attirer les talents.

Le digital ne concerne pas uniquement les start-ups, mais transforme aussi les métiers traditionnels.

 Dans l’agriculture, par exemple, les agritechs utilisent des drones et des capteurs pour optimiser les rendements. Dans la santé, la télémédecine se développe, créant des besoins en compétences hybrides alliant connaissances médicales et maîtrise technologique. 

Ce phénomène oblige les DRH à adapter leurs stratégies de recrutement en allant chercher des talents en dehors des circuits traditionnels, en favorisant la mobilité internationale, et en développant des programmes de formation internes pour faire évoluer les collaborateurs.

 

-4-Le défi de l’adéquation entre formation et marché du travail

L’un des principaux problèmes du marché du travail africain réside dans le fossé entre l’offre éducative et les besoins réels des entreprises. 

De nombreux jeunes diplômés sortent des universités avec des formations généralistes qui ne correspondent pas aux postes disponibles. 

À titre d’exemple, un pays comme le Nigeria produit chaque année des milliers de diplômés en sciences sociales alors que la demande des entreprises est orientée vers l’ingénierie, l’informatique et les métiers techniques.

Ce déséquilibre se traduit par un paradoxe : d’un côté, un chômage élevé des jeunes diplômés, de l’autre, des entreprises qui peinent à recruter les compétences nécessaires à leur croissance. 

Pour réduire cet écart, plusieurs gouvernements africains et acteurs privés investissent dans des centres de formation professionnelle, des partenariats public-privé et des programmes de formation duale inspirés du modèle européen. Les DRH doivent s’impliquer dans ces initiatives en définissant clairement les compétences attendues, afin que les formations soient mieux alignées sur les besoins réels du marché.

 

-5-Tableaux sur le décalage compétences/offre éducative

Exemple de déséquilibre formation/emploi (cas type Afrique de l’Ouest, 2025)

Filière universitaire la plus suivie % des diplômés sortants % de demande réelle sur le marché Écart
Sciences sociales & droit 40 % 10 % -30 %
Informatique & numérique 15 % 25 % +10 %
Ingénierie & BTP 12 % 20 % +8 %
Santé 8 % 15 % +7 %
Agriculture & environnement 10 % 18 % +8 %
Autres 15 % 12 % -3 %

 

-6-L’importance stratégique des soft skills

Outre les compétences techniques, les entreprises accordent une place croissante aux soft skills, comme la capacité d’adaptation, la communication, le travail en équipe ou encore l’esprit critique. Dans un contexte de forte mobilité professionnelle et de mutation technologique rapide, les entreprises africaines cherchent des talents capables d’apprendre en continu et de s’adapter à des environnements multiculturels.

Les DRH constatent que même dans les secteurs techniques, les profils qui réussissent sont ceux qui allient expertise et intelligence relationnelle. Cela explique l’émergence de nouvelles méthodes d’évaluation dans le recrutement, intégrant des tests de personnalité, des mises en situation et des entretiens comportementaux. Les soft skills deviennent ainsi un critère clé dans la construction des parcours professionnels en Afrique.

 

-7-Les besoins en compétences par pays africains et zones stratégiques

Même si l’Afrique partage des dynamiques communes, l’évolution des besoins en compétences diffère selon les pays, en fonction de leur structure économique et de leurs priorités de développement. Certains pays se positionnent comme de véritables hubs régionaux, capables d’attirer les talents et les investisseurs, tandis que d’autres doivent encore renforcer leurs capacités éducatives et institutionnelles pour mieux répondre aux exigences du marché du travail.

Le Maroc, par exemple, se distingue comme une plateforme africaine de l’automobile, de l’aéronautique et des énergies renouvelables. Les besoins y sont très élevés en ingénieurs industriels, techniciens spécialisés et experts en supply chain. 

Le pays a investi massivement dans des zones industrielles intégrées, ce qui pousse les DRH à rechercher des profils capables de travailler dans des environnements internationaux avec une forte exigence de qualité et de productivité.

En Afrique de l’Ouest, la Côte d’Ivoire et le Sénégal apparaissent comme des moteurs économiques grâce à leur stabilité politique et leur ouverture aux investissements étrangers. La Côte d’Ivoire concentre ses besoins sur l’agriculture modernisée, les infrastructures, les services financiers et les TIC. Le Sénégal, quant à lui, développe des pôles autour des énergies renouvelables, du numérique et du tourisme durable. 

Ces pays connaissent une forte demande en ingénieurs, en spécialistes de la gestion de projets et en experts du digital.

Le Nigeria, première économie africaine, présente un contraste entre son potentiel énorme et ses défis structurels. 

Le pays souffre d’un chômage élevé des jeunes diplômés mais dans le même temps, les entreprises cherchent désespérément des profils en ingénierie, en énergie, en fintech et en cybersécurité. 

Les DRH y font face à un marché du travail dual : surabondance de profils généralistes et pénurie de profils spécialisés.

Dans l’Afrique de l’Est, le Kenya et l’Éthiopie illustrent bien la dynamique régionale. Le Kenya est devenu un hub technologique surnommé la “Silicon Savannah”, où les start-ups recrutent massivement des experts en développement logiciel, en big data et en fintech. L’Éthiopie, en pleine modernisation, concentre ses besoins sur l’agriculture mécanisée, l’énergie et les infrastructures.

Enfin, l’Afrique du Sud reste un marché mature, avec des besoins élevés en ingénierie, en finance, en santé et en énergies vertes. Mais le pays connaît aussi une fuite des cerveaux, car de nombreux professionnels qualifiés émigrent vers l’Europe, l’Amérique du Nord ou l’Australie, poussant les entreprises locales à investir davantage dans la rétention des talents.

 

-8-Tableau comparatif des besoins en compétences par pays (2025-2030)

Pays Secteurs prioritaires Profils recherchés
Maroc Automobile, aéronautique, énergies Ingénieurs industriels, techniciens supply chain, spécialistes énergies renouvelables
Côte d’Ivoire Agriculture, TIC, finance Agro-ingénieurs, experts fintech, data analysts
Sénégal Énergies vertes, tourisme, numérique Ingénieurs solaires, gestionnaires de projets, développeurs
Nigeria Énergie, fintech, cybersécurité Ingénieurs pétroliers/renouvelables, experts cybersécurité, développeurs fintech
Kenya TIC, fintech, logistique Développeurs, data scientists, supply chain managers
Éthiopie Agriculture mécanisée, infrastructures Agro-techniciens, ingénieurs civils, spécialistes énergie
Afrique du Sud Finance, santé, énergies Médecins, ingénieurs énergie, experts finance et compliance

 

-9-Perspectives 2025-2035 : vers une compétition accrue pour les talents

Les dix prochaines années seront décisives pour l’Afrique, car la transformation structurelle de son économie va exiger des compétences encore plus pointues.

 Selon une étude de la Banque mondiale, près de 230 millions d’emplois en Afrique nécessiteront une adaptation des compétences d’ici 2035 en raison de l’automatisation, du numérique et de la transition énergétique. Cette évolution va accentuer la compétition entre entreprises locales et multinationales pour attirer les meilleurs talents.

Un autre facteur clé est la mobilité des talents africains. De plus en plus de jeunes diplômés se forment en Europe, en Amérique du Nord ou en Asie, et certains choisissent de revenir travailler en Afrique dans des conditions avantageuses. 

Ce phénomène, connu sous le nom de “reverse brain drain”, est stratégique pour les pays africains, car il permet d’injecter de nouvelles compétences dans les économies locales. Les DRH devront mettre en place des politiques attractives (salaire compétitif, perspectives de carrière, environnement de travail motivant) pour inciter ces talents à rester durablement.

 

-10-Prévision de la croissance des besoins en compétences (2025-2035)

Secteur Croissance estimée de la demande en compétences (%)
Numérique & TIC +150 %
Énergies renouvelables +120 %
Santé +100 %
Agriculture modernisée +80 %
Construction & BTP +70 %
Finance & Fintech +60 %
Logistique & Transport +50 %

 

-11-Le rôle stratégique des cabinets de recrutement internationaux

Face à la complexité du marché africain des compétences, les entreprises s’appuient de plus en plus sur des cabinets de recrutement spécialisés. Ces cabinets jouent un rôle central dans l’identification et l’attraction des talents rares, en particulier dans des secteurs hautement techniques. 

Leur valeur ajoutée réside dans leur capacité à comprendre les spécificités locales, à mobiliser des réseaux internationaux et à accompagner les entreprises dans la mise en place de stratégies RH adaptées.

Des cabinets comme Phénicia Conseil et sa filiale PhéniciaAfrica, par exemple, ont bâti une expertise unique en Afrique francophone et anglophone en aidant les entreprises à recruter des ingénieurs, des cadres supérieurs et des experts techniques. Leur approche repose sur la compréhension interculturelle, la connaissance fine des environnements économiques africains et l’accompagnement sur mesure des DRH.

L’avantage compétitif de ces acteurs est double : d’une part, ils apportent aux entreprises locales la rigueur et l’expertise du recrutement international ; d’autre part, ils permettent aux multinationales de s’implanter efficacement en Afrique en leur fournissant des talents locaux et expatriés qualifiés. Dans un contexte où les besoins en compétences évoluent rapidement, les cabinets de recrutement deviennent de véritables partenaires stratégiques pour garantir la croissance et la durabilité des projets.

 

-12-Recommandations stratégiques pour les DRH en Afrique

Les DRH africains et internationaux qui opèrent sur le continent doivent anticiper les mutations en cours pour rester compétitifs. Plusieurs axes stratégiques apparaissent incontournables :

  1. Renforcer la collaboration avec les universités et centres de formation afin de mieux aligner l’offre éducative avec les besoins du marché. 
  2. Les partenariats public-privé sont essentiels pour adapter les cursus aux réalités économiques.
  3. Investir dans la formation continue et la montée en compétences internes. 
  4. L’apprentissage tout au long de la vie doit devenir une norme dans les entreprises africaines, pour que les salariés puissent suivre le rythme des transformations technologiques.
  5. Valoriser les soft skills et l’adaptabilité. 
  6. Les DRH doivent intégrer des méthodes de recrutement et d’évaluation qui tiennent compte des qualités comportementales et relationnelles, en complément des compétences techniques.
  7. Mettre en place des politiques de rétention des talents. 
  8. La concurrence internationale est forte, et de nombreux Africains qualifiés sont attirés par l’expatriation. Des avantages sociaux, des perspectives de carrière et une culture d’entreprise forte sont indispensables pour fidéliser les meilleurs profils.
  9. Recourir à des cabinets de recrutement spécialisés.

 Face à la rareté des talents dans certains secteurs, externaliser le sourcing et bénéficier d’un accompagnement spécialisé devient une stratégie payante.

 

L’évolution des besoins en compétences en Afrique est à la fois une opportunité et un défi. Opportunité, car le continent possède un capital humain immense et une jeunesse dynamique qui peut devenir un moteur de croissance mondiale. 

Défi, car la vitesse des transformations économiques et technologiques impose d’adapter en urgence les systèmes éducatifs, les politiques publiques et les stratégies RH.

Les entreprises qui réussiront dans les dix prochaines années seront celles qui sauront anticiper les compétences de demain, investir dans la formation et développer des environnements de travail attractifs. 

Dans ce contexte, les DRH africains ont une responsabilité historique : transformer le potentiel démographique en une force économique durable, en mobilisant à la fois les talents locaux et les expertises internationales.

Le rôle des cabinets de recrutement spécialisés, comme Phénicia Conseil et PhéniciaAfrica, s’avère alors crucial pour accompagner cette dynamique. 

Grâce à leur expertise interculturelle et à leur compréhension des enjeux locaux et globaux, ils constituent des partenaires stratégiques pour répondre aux besoins croissants en compétences et contribuer au développement économique de l’Afrique.